Augmentation de la violence contre le personnel de santé en RDC

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Depuis le 20 octobre, 188 000 personnes ont été déplacées par les combats entre le groupe rebelle M23 et l’armée congolaise en RD Congo (RDC). La violence a un impact majeur sur les travailleurs·euses de la santé et la prestation de soins dans le pays. Mais le personnel de santé se fait entendre pour de meilleures conditions de travail.

L’offre de soins en danger

En 2021, nous décomptions 127 incidents de violence ou d’obstruction à l’encontre du personnel de santé en RDC. Une forte augmentation par rapport aux 81 incidents signalés en 2020. Ceux-ci relèvent de vol de matériel médical, d’arrestations et même d’enlèvements de membres du personnel de santé. Des pratiques qui ont souvent entraîné des blessures physiques, voire parfois la mort. Près de 90 % des incidents ont eu lieu dans le nord-est et l’est du pays, près de la frontière avec l’Ouganda voisin.

La violence a un impact important sur les prestations de santé en RDC. Dans la province d’Ituri, par exemple, plusieurs centres de santé ont dû fermer leurs portes et évacuer leur personnel vers la capitale de la province. Des milliers de résident·e·s se sont ainsi retrouvé·e·s sans accès aux soins de santé. À Djugu, les rebelles ont investi un hôpital et l’ont incendié. En conséquence, de nouveaux équipements médicaux d’une valeur de plus d’un million de dollars américains ont été perdus. Les rebelles ont finalement été chassés, mais la capacité de l’hôpital reste limitée en raison de l’importante perte d’équipement. En juin 2021, un autre hôpital, cette fois à Boga, a été complètement détruit. Du jour au lendemain, 80 000 personnes se sont retrouvées sans accès aux soins.

Les femmes enceintes et les jeunes enfants sont les principales victimes de l’accès limité aux soins de santé en RDC. Le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans en RDC est l’un des plus élevés au monde. La mortalité maternelle dans le pays reste également très élevée. En outre, la RDC a également été touchée par une nouvelle épidémie de rougeole en 2021. Plusieurs facteurs ont entravé les programmes de vaccination nationaux, résultant principalement d’établissements de santé insuffisamment équipés et de l’incapacité des équipes de vaccination à atteindre certaines communautés en raison de l’insécurité persistante. Dans le nord et l’est du pays, les plus jeunes enfants ne reçoivent toujours pas tous leurs vaccins infantiles. Il est à craindre que des maladies telles que la polio et la diphtérie ne reprennent ainsi le dessus, entraînant une augmentation des décès d’enfants.

Grève pour de meilleures conditions de travail

Le personnel de santé en RDC n’est pas seulement victime de violences, mais il travaille aussi dans de mauvaises conditions générales. Le 21 septembre dernier, des médecins et d’autres membres du personnel médical sont descendus dans la rue à Kinshasa pour réclamer de meilleures conditions de travail. Les médecins des hôpitaux publics sont en grève depuis des mois. Ils accusent le gouvernement de ne pas tenir ses promesses, notamment en ce qui concerne l’augmentation des salaires, l’allègement de la charge de travail et la garantie de pensions. La majorité des médecins se joignent à la grève, mais iels continuent d’assurer des services minimaux.

Après des mois de grève, les médecins du Syndicat National des Médecins (SYNAMED) et du Syndicat Libre des Médecins (SYLMED) ont décidé que la grève ne donnait pas assez de résultats. Ils ont donc initié une nouvelle manifestation pacifique le mercredi 21 septembre.

Alors que les médecins se déplaçaient de l’avenue des Huileries vers le boulevard, une confrontation violente a eu lieu avec la police de Kinshasa. Malgré le pacifisme de la manifestation qui était d’ailleurs autorisée. Certain·e·s manifestant·e·s ont été battu·e·s, frappé·e·s à coups de pied, maltraité·e·s et blessé·e·s. D’autres ont été arrêté·e·s puis relâché·e·s.

Campagne de solidarité avec le personnel de santé en grève

L’indignation des médecins est grande face aux manifestations de violence de la police. Ils veulent poursuivre la grève par le biais du mouvement “hôpitaux sans médecins”. Même si la grève a un impact important sur la qualité des soins dans les hôpitaux publics. En temps normal, l’accès à des soins de santé décents est déjà compromis pour 90 % de la population. Il est donc essentiel que les demandes des médecins en grève soient satisfaites.

Avec les syndicats impliqués dans la grève, Etoile du Sud et Si Jeunesse Savait, nos deux partenaires congolais, ont lancé la campagne de solidarité en ligne “Mosalayamongasanténabiso” (“le travail des travailleurs·euses de la santé est notre santé” en lingala). Grâce à cette campagne, ils ont sensibilisé le public aux défis auxquels sont confrontés les travailleurs·euses de la santé en RDC et ont renforcé leur soutien dans cette grève. Reste à savoir si la campagne sera couronnée de succès à long terme, mais les organisations ont déjà réussi à obtenir une réponse du Ministre de la Santé de la RDC. Ce dernier a affirmé sur Twitter qu’il allait travailler à une solution. Le personnel de santé continue à faire pression pour obtenir de meilleures conditions de travail dans le secteur de la santé publique afin que le droit généralisé à la santé des Congolais·e·s soit garanti.